Miss Lovely d'Ashim Ahluwalia se présente comme un presque premier film, indien et indé, produit en dehors de Bollywood. C'est dans la sélection Un certain regard. Le réalisateur, sur scène, avant la projection, nous demande d'oublier nos préjugés sur le cinéma indien et de nous attendre à du neuf. Déjà, on a un peu peur. On aurait préféré qu'il ne jette pas d'huile sur notre horizon d'attente.
Thierry Frémaux, sélectionneur, dit n'avoir vu du film qu'un montage non définitif. Il plaisante : «Peut-être que c'est un autre film qu'on va voir.» La bande-annonce, du moins, est très attirante.
Mon corps dans ton film
On n'est pas critique par décor, par divertissement. Du moins, il faut l'espérer. On ne peut l'être bien que par nécessité. On aime à dire que le critique est un artiste raté. Mais c'est le cas de la plupart de ceux qui vont voir un film, lisent un livre, visitent une expo.
Parce que face à une oeuvre, on aime qu'elle déplace quelque chose en nous, qu'elle introduise du jeu dans notre perception. Dans un tableau, le plaisir qu'on prend, peut-être, est de voir réalisés sur la toile un geste, un agencement de couleurs qu'on avait en nous, mais qu'on n'avait jamais actualisés. Et quand on les a sous nos yeux, on les reconnaît. On dit : «c'est exactement ça.» Ce geste, là, dans l'oeuvre, c'est précisément ce mouvement qui était dans mon corps, que je cherchais à exprimer.
Bien sûr, on n'est pas obligé d'aimer les oeuvres en artiste, en amitié avec le créateur. On peut aussi aller au cinéma