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Libération
Critique

L’épreuve par cinq

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Erreur judiciaire . Ken Burns revient, dans un documentaire, sur la condamnation pour meurtre, à tort, de cinq ados américains.
«Central Park Five» de Ken Burns, Sarah Burns et David McMahon. (DR)
publié le 24 mai 2012 à 22h16

C'est un documentaire qui, paradoxalement, fait un bien fou. Et pourtant, il est fait de la même substance vénéneuse et exploitée jusqu'au trognon par toutes les chaînes de télévision depuis des lustres. Un fait divers épouvantable qui s'est déroulé à la fin des années 80 à New York : cinq gamins noirs et portoricains ont été jugés et injustement condamnés pour le viol et l'agression d'une jeune femme dans Central Park. A l'énoncé de l'affaire, on imagine déjà les indignations de pacotille des animateurs transformés en détective de l'écran, les intonations théâtrales des commentaires, les reconstitutions à la petite semaine… Si Central Park Five produit cet effet apaisant, c'est qu'il joue sa partition à contretemps de l'émotion et désigne précisément les coupables de cette erreur judiciaire : l'aveuglement d'une société et la puissance des images à qui on peut, à toute force, faire dire ce que l'on veut. Ce qui, pour un documentaire filmé, fait la démonstration d'un certain courage et d'une belle lucidité.

Crack. Il faut dire que le réalisateur Ken Burns n'est pas tout à fait le premier venu. Pour dire la qualité du bonhomme, il suffit de rappeler qu'il réplique à ceux qui s'étonnent de la longueur de ses films : «Il faut du temps pour expliquer. Plus on raccourcit, plus on veut faire simple, plus on court le risque de mentir.» C'est sans doute pour régler son compte à tout suspense frelaté que le film commence par l'épilogue de l'affaire.

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