ACannes, pendant le Festival, les mots n’ont pas forcément le même sens qu’ailleurs. Un rendez-vous, par exemple. Piège pour le néophyte, qui croit qu’il s’agit de rencontrer quelqu’un dans un lieu et à une heure déterminés. Mais l’heure changera, le lieu aussi, et parfois même la personne, tandis que vous courrez frénétiquement d’un bout à l’autre de la Croisette, l’accréditation battant au cou, l’angoisse de la page blanche grimpant en tête. Ainsi, nous avions rendez-vous avec Pete Doherty. Reporté, le rocker préférant nous voir après la projection de son film. No problem, Pete. Avant de découvrir, six heures plus tard, sous les trombes d’eau et les rafales de vent, une semelle emportée par le caniveau débordant, que nous n’avions… pas d’invitation pour la projection.
Le désespoir donne parfois des ailes. Et nous voilà incrustée dans une limousine du cortège officiel, obligeant le producteur à grimper sur les genoux du distributeur. Nous passerons sur le plaisir que ces gens en smoking ont eu à héberger, pendant vingt minutes, une journaliste dégoulinante leur transperçant le dos avec les baleines d’un parapluie éventré. Pas la peine de s’étendre non plus sur la montée des marches aux côtés de l’équipe du film, en cheveux-jean-blouson trempés et baskets mono-semelle, le squelette hérissé d’un ex-parapluie panthère en étendard. Nous retiendrons seulement que, dans la voiture, il y avait Julie Judd, amour de jeune actrice, accueillante, drôle, enjouée, vivifiante. Grâce à ell