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Libération
portrait

Joana Preiss. Charme perché

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Egérie underground, cette musicienne qui ainspiré photographe et créateurs, vient de réaliser une autofiction ciné.
publié le 24 juin 2012 à 19h06

Il y a des chaussures de jogging roses qui dégoulinent sur le petit balcon en plein ciel et une veste noire à étiquette Chanel qui essore ses orages sur le dossier d’une chaise.

Joana Preiss niche au 6e étage d'un immeuble silencieux au cœur d'un quartier bruyant et mélangé. Elle partage deux chambres et un living-bureau avec son fils de 19 ans, étudiant en philo et guitariste rock. Elle était déjà égérie des créateurs de mode, interprète lyrique ultracontemporaine et actrice hype aux participations minimales. La voilà toute neuve réalisatrice d'une autofiction stimulante intitulée Sibérie.

A quoi ressemble-t-elle ? Elle a 40 ans et sa silhouette adolescente et androgyne semble strictement tenue en lisière du classicisme féminin. On se dit qu'elle doit pouvoir faufiler son individualité par les fissures des murs lépreux, se cabrer en picador pour planter les aiguilles arrachées au cadran de la montre dans la nuque du temps, et puis finir par lover son intimité en battle-dress dans le creux d'épaule de la créativité. Le cheveu est sombre, l'œil marbré, les bras maigres et, tant qu'elle fait silence, on la verrait volontiers en personnage du Greco, carne efflanquée, reine massacrée, Don Quichotte à lance brisée.

La chose se complique quand elle commence à parler, profuse, labile, mais interjetant appel de sa propension à l'empathie d'un rire malaisé qui vrille son propos. Le visage se ride d'expressions puis se fait calme d'après temp