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Portrait

Marker est mort, chat alors !

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Le réalisateur de «la Jetée» et de «Sans soleil» est mort dimanche, le jour de ses 91 ans. Au terme de ses nombreux avatars, l’artiste polymorphe n’apparaissait plus qu’en matou matois.
publié le 30 juillet 2012 à 22h26

Soyons respectueux, mais soyons prudents : Chris Marker est peut-être mort, dimanche 29 juillet, chez lui, à Paris, le jour même de son 91e anniversaire. Peut-être mort, car on aimerait en douter, mais aussi pour rendre un hommage approprié à sa très versatile personne, à sa très ondoyante identité, cette capacité qu'a toujours démontrée Chris Marker à organiser son propre effacement, sa propre disparition, bien avant que la mort n'en décide.

Avant d’être une suite factuelle d’événements tangibles, la biographie de Chris Marker est donc à considérer d’abord comme le champ d’intervention, libre et mouvant, d’un artiste multipolaire, où les dédoublements, les inventions et les avatars se confondent avec les faits. Ceux-ci nous enseignent que Chris Marker est né sous l’état civil de Christian-François Bouche-Villeneuve, le 29 juillet 1921 à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), et non à Oulan-Bator, capitale de la Mongolie, comme il s’est amusé à le faire croire.

Le mystère reste épais sur ses années de jeunesse : un séjour de deux ans, enfant, à Cuba, des études dans les beaux quartiers, une licence de philosophie obtenue au moment où éclate la Seconde Guerre mondiale. Alors adolescent, il entre en Résistance : c’est là qu’il se forge son pseudo.

Ses premières interventions dans la sphère intellectuelle se feront via la revue Esprit, en plein renouveau d'après-guerre, qui accueille, entre 1946 et 1955, ses nombreuses contributions déjà polymorphes (commentaires,