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Libération
Critique

«Tourbillon», bon pied bon deuil

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Batucada. Premier film brésilien autour d’une octogénaire luxuriante.
(DR. )
publié le 15 août 2012 à 21h16

A São Romão, aride bourgade accablée par le soleil de la province du Sertão Nordeste, les vies suivent un cours immobile auquel rien ou presque ne s’est imprimé de la modernité des mégalopoles brésiliennes, et nul n’a peur de la mort. Surtout pas ces vieilles femmes aux gueules carbonisées qui n’ont jamais cessé de danser, chanter, se consumer jusqu’au fond des nuits dans les ondoiements syncopés de la batucada. Parmi elles, il y a Bastu, 81 ans, tempérament d’enfant folâtre couplé à la sagesse des origines, laissée seule par la disparition aussi soudaine que fugitive de son alcoolique de mari, le forgeron Feliciano.

Ouvert sur les chants, les trompettes et les percussions qui sonnent sur chaque perron, le premier long métrage d'Helvécio Marins Jr et Clarissa Campolina fait de cette femme l'œil rieur d'un tourbillon de fictions ramassées et mélodieuses prélevées directement sur ses acteurs, la matrice de son pas de deux agile, quoiqu'un rien scolaire, entre documentaire et fiction.

Au gré des paroles de Bastu, qui continue de mener sa vie de joies artisanales à une lenteur choisie, s'entrelacent sans cesse récits oniriques et de soi, rêveries luxuriantes et témoignages aphoristiques d'une expérience du monde : «Nous n'avons ni début ni fin, nous ne sommes ni vieux ni jeunes, nous vivons, c'est tout.» Dans des plans saisis entre ténèbres charbonneuses et lumières roussies, d'une force plastique certaine, mais qui n'en frisent pas moins parfois une inconsista