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Libération
Critique

Poison pané

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Dans «Quelques heures de printemps», Stéphane Brizé regarde l’euthanasie dans les yeux. Un mélo problématique.
publié le 18 septembre 2012 à 19h08

On aimerait pouvoir mourir dignement, sans trop de souffrance et surtout sans Stéphane Brizé à notre chevet. Le cinéaste signe, avec Quelques heures de printemps, un genre de mélo prolétarien sur la fin de vie et le suicide médicalement assisté. Le sujet ne prête pas spécialement à rire, mais, une fois remis de la séquence émotion, on est en droit de s'interroger : est-ce qu'en ce domaine les larmes, surtout tirées avec de tels cordages en acier dramaturgique, de telles ruses de Sioux drapées dans un nuage de fumée auteuriste, nous sont d'aucuns secours, moral ou intellectuel ? A l'heure qu'il est, et jusqu'à preuve du contraire, la réponse est non.

Yvette Evrard est une femme ordinaire dans une bourgade de province morose, une veuve qui se tient droite et que l'existence a endurcie (on comprend que son mari n'était pas un cadeau), l'acculant à une solitude revêche. Il n'y a plus guère que son gros chien dormeur qu'elle supporte (et réciproquement). Soudain, dans son intérieur bien tenu qu'elle brique comme une folle déboule son fils, Alain, un routier quinquagénaire qui vient de couler dix-huit mois en prison pour une «connerie» : il a transporté dans son camion une cargaison de came.

Infantile. La coexistence entre ces deux taiseux qui n'ont plus rien d'autres à partager qu'une tenace acrimonie sans objet se passe mal. Alain tourne en rond à l'intérieur du cercle terriblement rétréci de son destin de gagne-petit lessivé et Yvette, retraitée