Quand elle était petite, on lui avait dit que les chemineaux avaient l'habitude de placer des signes mystérieux sur les portes des fermes auxquelles ils avaient frappé. Ces encoches sur le bois disaient «ici, on est gentil», «ici, on donne», ou «ici, on est méchant». Simone Signoret a sans doute rêvé d'avoir sur sa porte des inscriptions de la première catégorie. Et c'est parce qu'elle y a réussi que tant de gens seront tristes aujourd'hui. Ce n'était pas une star mais c'était plus qu'une actrice, plus que la femme d'une star, plus qu'un auteur à succès, plus qu'une intellectuelle de gauche.
Il fallait être une sacrée bonne femme pour épouser Montand déjà célèbre et réussir à garder son nom accolé au sien, comme celui d'un couple d'égaux. Une sacrée bonne femme pour réussir, quand on a joué Casque d'or, à vieillir aux yeux de tous, à la scène et à l'écran.
Beaucoup de ses amis auront appris hier qu'elle combattait depuis quatre ans le cancer qui l'a tué. Comme beaucoup de Français découvriront que, la dernière fois qu'ils l'ont vue, à Apostrophes, présentant Adieu Volodia, les yeux verts de Casque d'or étaient déjà presque aveugles. Paradoxe, elle perdait la vue à mesure qu'elle devenait écrivain.
Même si elle en a souvent incarné l’image, Simone Signoret n’avait rien de l’intellectuelle pétitionnaire. Et même si elle en a beaucoup signé, la pétition n’était pas sa tasse de thé. Son genre à elle, c’était plus la mauvaise con