Avec les Enfants du paradis, on se trouve devant un cas à la fois grandiose et embarrassant. Ce n'est pas simplement l'un de ces nombreux films monuments dont, de Gance en Vigo, de Guitry en Renoir, le vaste et vieux pays du cinéma français est rempli. Les Enfants du paradis, c'est un peu la tour Eiffel de tous les films français : une proéminence qui tient à la fois à ses moyens, à sa durée, à son ampleur et à l'universalité de son thème amoureux et théâtral. Mais une plus étrange pérennité s'ajoute à ces ingrédients : une forme d'académisme un peu rigide qui le protège du temps.
«Collaboration». Le découvrir aujourd'hui dans sa version somptueusement restaurée renforce encore cette impression que l'industrie du cinéma français, ses arts et techniques, son artisanat, atteignaient avec les Enfants du paradis un sommet historique. Quel que soit l'étage que l'on considère parmi les «métiers» qui constituent le processus de fabrication du cinéma, quelle que soit la fenêtre à laquelle on se penche pour tenter d'en observer les machineries cachées, on se retrouve toujours face à ce même sentiment de quasi-perfection formelle.
Naturellement, le fait que le film ait été tourné sous l'Occupation (et été exploité après la Libération) rend son statut et son appréciation encore plus problématiques… A ce propos, vers la fin du générique d'ouverture, on peut lire cet incroyable carton «Collaboration dans la clandestinité : décors d'Alexandre