Depuis qu’il est adolescent, Sébastien Lifshitz collectionne les photos d’amateurs qu’il chine dans les puces du monde entier. Il en a accumulé des milliers. Hommes, femmes, enfants, chiens, paysages. Toutes anonymes. Et de tomber un jour sur un album où figurent deux dames très comme il faut. Ou comme il ne faut pas ?
Pourquoi avoir acheté de telles photos ?
Elles n'avaient rien d'extraordinaire. Deux dames françaises des années 50 d'allure Jour de France se photographiant en Kodacolor avec un déclencheur retard dans un intérieur bourgeois. Pourtant quelque chose m'intriguait dans ce duo, certains gestes, un regard. J'ai trouvé d'autres albums photos représentant ces mêmes dames. Et suite à une sorte d'enquête à l'intérieur des images, l'évidence m'est apparue : ce duo était un couple. D'où une question : pourquoi ces femmes ont-elles ressenti le besoin de s'exposer jusqu'à prendre le risque - on n'avait pas encore inventé le Polaroid - de porter ses pellicules intimes chez un photographe pour qu'il les développe ? Il y avait de leur part une volonté de se rendre visibles qui plus est dans une intimité heureuse. J'ai trouvé des dizaines d'autres photos de ce genre, surgissant de toutes les époques, de tous les milieux, de tous les pays, qui, mises bout à bout, construisent comme un long métrage d'une homosexualité, certes clandestine, mais épanouie. Je ne veux pas dire que les pédés et les gouines n'ont pas souffert et ne souffrent pas encore aujourd'hui. Mais il y a une réalité sociale et historique de l'