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Mekas qui se passe ?

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Hommage. Journal intime, fictions, docus… l’œuvre du héros expérimental resurgit en DVD et dans une rétro à Beaubourg.
Jonas Mekas. (Furio Detti)
publié le 27 novembre 2012 à 19h36
(mis à jour le 28 novembre 2012 à 11h25)

Pour tous les enfants voulant faire du cinéma, qui ne rêvent que boîtes de prod, scénars touffus et stars bankables, Jonas Mekas est une claque vivante. Avec lui, c'est un œil, une cam et basta : «Il faut devenir un instrument. On ne regarde pas autour de soi en se demandant ce qu'on va filmer. Non, on n'y pense pas. On sait que c'est ça qu'il faut filmer : soudain on prend la caméra, et on tourne. Le travail le plus difficile, c'est sur soi.»

Son cinéma, c'est celui de l'image, de la révélation au sens chimique et spirituel. Un film de Mekas est comme une photo qui apparaîtrait infiniment au fond d'un bain d'hydroquinone, épiphanie du monde qu'on ne connaît plus guère aujourd'hui que devant un logiciel de montage quand, accolant deux plans, on parvient à faire tenir ensemble un temps et un espace qui n'existent pas. Etincelle frankensteinienne. Aussi bien, Mekas en vrai a-t-il à peu près l'accent de Bela Lugosi, roulant d'interminables «r» lituaniens dans son anglais d'adoption (il arrive aux Etats-Unis en 1949, à l'âge de 25 ans) pour appeler tout le monde «my frrrriend».

Ritournelles. Cette voix, on l'entend dans certains de ses films, comme Lost, Lost, Lost (1976), tourné avec son frère Adolfas entre 1949 et 1963 au moyen d'une Bolex, et qui «décrit, déclarait-il lors de sa sortie, l'état d'esprit d'une "personne déplacée" qui n'a pas encore oublié son pays natal mais qui n'en a pas encore "gagné" un nouveau