Ceux qui avaient rêvé une biographie romancée de L. Ron Hubbard, le fondateur de l’Eglise de scientologie, doivent toutes affaires cessantes reconsidérer leurs attentes à propos du nouveau film de Paul Thomas Anderson. Certes, Lancaster Dodd (Philip Seymour Hoffman), campe un convaincant gourou, aussi jovial et charismatique qu’inquiétant, doté d’une imagination et d’un culot sans bornes. De même, les douces années 50, pétantes de santé sous la caméra 70 mm Technicolor, sont restituées comme le cadre idéalisé d’une époque où toutes les expériences, toutes les idées, possédaient la fraîcheur enivrante de l’inédit.
Enfin, le paumé Freddie Quell, incarné par un Joaquin Phoenix famélique, arbore un tel épuisement de lui-même qu’il rend presque logique son désir de se voir pris en charge au sein d’une organisation - secte, religion ou escroquerie, peu importe -, à condition qu’elle lui donne de quoi manger et qu’on lui accorde un minimum d’intérêt. Voilà tout pour la scientologie, dont le nom n’est jamais prononcé. Quant au chapitre de la doctrine qui en serait sa bible secrète, les tirades absconses de son chef spirituel fournissent un tel fatras de psychanalyse et d’ésotérisme de bazar qu’elle relève plus d’une musique de fond absurde que d’un message critique.
Relations tordues. L'idée d'Anderson est donc ailleurs, s'appuyant sur les relations tordues qu'entretiennent ces deux personnages dans le contexte pas encore délétère d'un mouvement qui vient au monde. L'