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Libération
Interview

«Je recherchais un clair-obscur caravagesque»

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Kathryn Bigelow, réalisatrice, et Mark Boal, scénariste de «Zero Dark Thirty», évoquent la construction d’un film chamboulée par la mort de Ben Laden.
Jessica Chastain incarne Maya, personnage central de l'histoire. (Jonathan Olley. Columbia Pictures Industries. )
publié le 22 janvier 2013 à 19h06

Couverte d'oscars il y a trois ans pour Démineurs, Kathryn Bigelow a connu une fin d'année 2012 plus saumâtre. Cible de vilains tweets aux relents sexistes de l'écrivain Bret Easton Ellis («Kathryn Bigelow serait considérée comme un réalisateur médiocre si elle n'était surcotée simplement parce que c'est une femme canon plutôt qu'un homme»), elle fut surtout prise aux Etats-Unis entre les feux contradictoires de controverses visant son dernier film, accusé tantôt de dénigrer la CIA, tantôt de faire l'apologie de la torture. De fait, c'est un rien crispée que la cinéaste est venue assurer la promotion du film en France, sous l'escorte atrabilaire de son scénariste, Mark Boal. La veille de l'entretien, une consœur bienveillante nous avait prévenus : «Il joue le rôle du bodyguard. Autrement dit, il t'agresse dès que tu parles de la polémique.» Le film étant suffisamment passionnant en lui-même, on ne s'y est pas risqué - ce qui ne l'a pas empêché d'être désagréable, passant le plus clair de l'entretien à nous regarder fixement avec une intensité méchante, entre deux lampées goulues de soupe à l'oignon.

Zero Dark Thirty est sorti seulement un an et demi après la mort de Ben Laden. Pourquoi si vite ?

Kathryn Bigelow : La correspondance temporelle entre ce que racontait le film que l'on préparait et le dénouement des événements dont il s'inspire dans la vraie vie a dicté naturellement une certaine urgence, une vitesse qui répondait à ma curiosité, à mon désir pressé de partager un récit. Dix ans après le 11 Septembre venait de surveni