Les premières images nous catapultent dans un bon gros bol d’air suisse qui fleure bon l’edelweiss. La ventilation a un effet immédiat : dès les premières minutes, on a envie de plonger dans l’écran, de fourrer une bouteille d’eau dans un sac à dos et de filer le train à Fred, là-haut dans ses montagnes. Barbe grise et chapeau tyrolien vissé sur un crâne dégarni, Fred est un apiculteur à l’ancienne, qui va chercher des ruches sauvages à mains nues. Il ne se protège pas, mais protège ses abeilles, notamment l’abeille noire, une butineuse régulière acclimatée aux montagnes et aux fleurs sauvages qui produit un miel sombre et parfumé. Lorsqu’elles vont s’encanailler dans la vallée d’à-côté et qu’elles reviennent le corps plus tigré qu’à l’ordinaire, Fred les décapite, pour préserver la pureté de l’espèce.
Nectar. Choc culturel. On quitte la fraîcheur des Alpes suisses pour les plaines monocultivées de Californie où des dizaines de milliers d'ouvrières font l'amour sans relâche aux fleurs blanches des amandiers. Les plantations s'étendent à perte de vue et le bourdonnement entêtant régale John Miller, apiculteur industriel, sans états d'âme mais riche à millions : «C'est le son de l'argent», glousse-t-il. Il loue ses ruches - 4 000 sur la plantation d'amandiers - le temps d'une pollinisation industrielle qui lui rapporte 600 000 dollars. Ensuite, il les mettra sur un camion et leur fera traverser les Etats-Unis pour qu'elles aillent