Il n'y a qu'au festival de Berlin que dans une sélection certes parallèle mais officielle - le Forum - on peut assister à la projection d'un film qui d'ordinaire serait confinée dans le sanctuaire des musées ou des galeries. Stemple Pass, de l'Américain James Benning, est pourtant ce qu'on a vu à Berlin de plus stupéfiant, encourageant et perturbant. Le «dispositif» est de type saisonnier : un paysage forestier dans les montagnes du Montana, filmé en quatre plans fixes de 30 minutes chacun. Pour ce voyage, nous partîmes une centaine de spectateurs mais, par le prompt renfort des magies de la contemplation, nous étions toujours la même centaine en arrivant à bon port.
Zonzon. Entre autres questions contrariantes, Stempel Pass pose celle du spectateur : Que fait-on là ? Que regarde-t-on qu'on ne verrait pas si on installait son pliant et son thermos devant un tel paysage ? Au fil des saisons : le brouillard et ses progrès, la neige et le ballet des flocons, les nuages filants, un coucher de soleil en temps réel. Qu'est-ce qu'on entend, enregistré en son direct, qu'on ne percevrait pas en dressant seulement l'oreille ? Des battements d'ailes, des cris animaux, le zonzon des insectes. Mouvements discrets et micro-événements qui soulagent et vengent des grands gestes et autres baroufs du ciné dominant.
Mais aussi, en contre-chant, la voix off de James Benning qui lit des textes en pétard de Ted Kaczynski, où il est vivement qu