A la dix-huitième minute de Free Angela, apparaît à l'écran un visage poupin, celui d'un jeune journaliste américain à lunettes, qui déclare, micro en main : «Le vice-président Agnew décrit les Black Panthers comme un groupe de criminels complètement anarchique et irresponsable. Pour Hoover, le directeur du FBI, ils sont le plus grave danger actuel pour la sécurité intérieure.» A lui seul, pendant quelques secondes, ce type à frange Beatles et pardessus d'indic incarne toute la bêtise contemporaine. A savoir l'incapacité à saisir le négatif de sa propre époque, la soumission à la voix de son maître. Il fait son travail de mauvais journaliste : il égrène les faits. Il ne dit pas que les Black Panthers ont tort. Il dit : tout le monde pense qu'ils ont tort. Et ce type a l'air si près de nous qu'on le croirait d'hier. C'est tout l'intérêt dérangeant de Free Angela qui, pour le reste, est un bon documentaire, du genre télé. Angela Davis raconte son histoire depuis aujourd'hui (lire son interview par Virginie Despentes dans Libération du 21 mars) , à quoi s'ajoutent les témoignages de ses compagnons de route, d'officiels, et un stock passionnant de documents d'archive.
Décalage. L'histoire