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Libération
Critique

«11,6» : Musulin, à butin rompu

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Millions. L’étrange braquage puis reddition du convoyeur de fonds. Sobre.
François Cluzet (Toni Musulin). (Photo DR)
publié le 2 avril 2013 à 20h06

A part quelques esprits chagrins (banquiers, policiers ou magistrats), la France s’était gondolée, fin 2009, grâce à Toni Musulin. Personne n’a oublié l’audace de ce convoyeur de fonds qui, après dix ans de bons et loyaux services rémunérés un peu au-dessus du Smic, avait faussé compagnie à ses collègues en pleine tournée, fauchant le camion blindé et les 11,6 millions d’euros en billets de banque qu’il contenait. Tout, dans cette histoire, avait de quoi faire voler en éclats le couvercle de la boîte à fantasmes : la richesse soudaine d’un prolo, la douceur et la simplicité de la méthode (il avait simplement appuyé sur l’accélérateur du camion), sans oublier ce sentiment de vengeance par procuration d’une population esquintée par la crise, pour laquelle le casse a pris l’allure d’un règlement de compte social.

Cette dimension forme la colonne vertébrale du film de Philippe Godeau, librement inspiré du livre d'Alice Géraud, journaliste à Libération, Toni 11,6 - Histoire du convoyeur. Ici, Musulin n'est ni le froid génie du crime que certains ont imaginé, ni un Robin des Bois moderne oubliant de redistribuer aux pauvres. C'est un type avare et plutôt désagréable que des années d'humiliation ont conduit à fomenter ce coup d'éclat. Surtout, il reste un mystère complet que François Cluzet, de marbre d'un bout à l'autre, se fait un devoir d'incarner sur un mode minimaliste. Un personnage à la limite de l'abstraction, appartenant soudain à tous ceux qui, comme lui,