Une petite fille en réveille une autre et lui glisse à l'oreille : «Dépêche-toi, il faut partir. Mamá est revenue.» Les deux gamines descendent l'escalier, se dirigent à pas feutrés vers la porte d'entrée, sursautent. Mamá est là, un spectre en nuisette à la figure grise et aux cheveux saturés d'électricité statique, qui se rue sur elles d'une démarche saccadée, rubato, lente, rapide. Cette icône du fantôme domestique surgissant près d'un frigo dans un bruitage d'os concassés, on l'a vue mille fois, de Ring à Kaïro. Celle-ci n'est pas plus réussie que les autres, mais l'ambiance nocturne, les hurlements des fillettes qui remontent l'escalier paniquées et un finale abrupt en dopent l'effet de terreur. C'est cet effroi brut, sans explication ni contexte, qui a plu à Guillermo del Toro dans ce court métrage en forme de plan-séquence de trois minutes réalisé par Andrés Muschietti en 2008, Mamá.
Enchevêtrement. Cinq ans après sort en salles la version long métrage, produite par Del Toro. Entre les deux, Mama a perdu l'accent sur le second «a». Certainement par simplification. Lors de la présentation du film au festival de Gérardmer, un samedi matin neigeux de début février, Andrés Muschietti expliquait, dans une logique toute sarkozienne : «Le court métrage a très bien marché. Alors on a fait 40 fois plus long pour que vous aimiez quarante fois plus.» L'inverse aurait été dommage,