En deux longs métrages, celui-ci et Un poison violent, réalisé en 2010, Katell Quillévéré a eu le temps de définir ce qui l'intéressait au plus haut point. Dans Un poison violent, c'était la brutalité avec laquelle une adolescente faisait face à la fois à ses premiers émois sentimentaux et à une sévère crise mystique. Dans Suzanne, c'est à nouveau un personnage de jeune fille qui est au centre du film, cette fois engluée dans le déterminisme social d'une famille modeste, coincée entre l'affection pudique et silencieuse d'un père qui ne comprend pas grand-chose ou toujours trop tard, et celle d'une sœur adorée qui s'est résignée à ce que son existence laborieuse devienne peu à peu l'exacte et sinistre réplique de celle de son père fourbu. Et c'est une fois encore la manière dont cette jeune femme tente, à coups redoublés, de s'arracher à un destin écrit d'avance qui fait le cœur du film de Katell Quillévéré.
Torgnole. Comme le montre le film qui suit l'évolution de son héroïne sur une moitié de vie, Suzanne est une rebelle qui s'ignore. Ses choix radicaux, parfois terribles, ne sont dirigés contre personne sauf, peut-être, elle-même. Adolescente, elle tombe enceinte et décide de garder le bébé «parce qu'elle en a envie», comme elle le dit à son père avant de ramasser une torgnole à lui décoller la tête. A peine adulte, alors qu'un boulot lugubre de secrétaire dans l'entreprise de transports qui emploie é