«Je ne m'attendais pas du tout à ça», confiait hier une spectatrice à la sortie de la projection de Salvo. Nous non plus, puisqu'il est difficile de présumer quoi que ce soit d'un premier film coréalisé par deux Italiens inconnus à notre bataillon (Fabio Grassadonia et Antonio Piazza), et interprété par des acteurs jamais vus. C'est une loterie typiquement cannoise : parier au jugé, voire à l'aveugle, sur un film inattendu et en sortir avec le bingo au fond des yeux. Pourtant, après lecture propédeutique et ultrarapide du scénario, la perspective de se fader un nouveau film sur la mafia sicilienne paraissait un rien bouchée.
Les premières scènes sont un rebrousse-poil : oublier Palerme, que l'on découvre par la coulisse de ses banlieues déglinguées. Salvo est un film de quartier. Suite à un guet-apens dans un chemin creux, un règlement de compte a lieu qui déchaîne l'habituel concerto de pétoires. Sauf qu'on n'y comprend rien, sinon un mode de tuer qui a tout l'air d'être un mode de vie pour Salvo, homme jeune et tueur professionnel dont la silhouette massive (excellent Saleh Bakri) va prendre la consistance d'un personnage au fil des apartés de sa vie, privée de vie.
Voyeurisme. Une chambre plus que crapoteuse dans une pensione clandestine très mal tenue par une taulière peu amène et son fils à lunettes timoré. Quelque chose du Samouraï de Melville dans ce mortel qui se résume à la mort sur ord