Est-ce qu'on peut être à la fois le cancre qui ricane au fond de la classe et l'élève qui remporte les meilleures notes, les prix d'excellence et les félicitations enthousiastes des profs ? Les frères Coen ont opéré cette synthèse à deux, un pied dedans, un pied dehors, antisystème et establishment, voiture-balai et champion du monde. Inside Llewyn Davis parle de talent, de carrière, d'intégrité, inventant un chanteur folk à New York en 1961 dans les parages hivernaux de Washington Square et Bleecker Street.
Inside Llewyn Davis s'inspire de The Mayor of MacDougal Street, un livre autobiographique du chanteur et musicien Dave Van Ronk, un type qui a eu beaucoup d'influence, mais aucun succès commercial. Llewyn Davis chante en s'accompagnant de sa guitare. Il n'a pas un rond. L'acolyte avec lequel il avait enregistré un disque s'est suicidé, le laissant galérer seul. Il squatte de canapés en couvertures à même le sol, essuyant les insultes d'une copine (qu'il a mise enceinte), de sa sœur, les ricanements du vieil agent qui lui propose de lui filer un vieux manteau en guise de cachet.
Sobriété. La caméra plonge à chaque plan dans les grands yeux tristes ou hagards de Llewyn Davis qui déambule dans les rues blêmes du Village ou au milieu des blocs de neige à Chicago. Issu de la classe ouvrière, ayant été dans la marine marchande (comme Van Ronk), Davis ne peut compter sur personne, et son calvaire morose est