Avec un brin de perversité, il est amusant d'imaginer ce qu'un studio américain ou une grosse production européenne aurait pu faire de l'histoire de Michael Kohlhaas. A coup sûr, une épopée grandiose dans cette Europe encore féodale du XVIe siècle, pleine de batailles féroces à 5 000 figurants, d'effets spéciaux de préférence en 3D, le tout sur une bande originale tonitruante forçant sur les cuivres. Tout s'y prête, à commencer par le thème, décidément inépuisable, de la vengeance.
Michael Kohlhaas est un marchand de chevaux prospère qui, confronté à une injustice flagrante bien que peu spectaculaire, renonce brutalement au confort de sa condition pour se rebeller contre un ordre corrompu. Lorsque deux de ses chevaux sont confisqués par le caprice vénal d’un noblaillon local (nommé dans le film «le baron», ce qui n’est pas très prudent à Cannes sous peine de risquer l’exclusion à vie du célèbre club du même nom), notre homme quitte son costume de commerçant pour endosser celui de redresseur de tort. Et quand son épouse, venue plaider sa cause auprès de la souveraine, revient blessée à mort, c’est en guerrier implacable qu’il se métamorphose. Sa vendetta personnelle se transforme en guerre civile lorsque des centaines de paysans viennent lui prêter main-forte pour mener une croisade politique aboutissant, presque mais pas tout à fait, à une révolution en bonne et due forme.
Dénuement. Si le roman de Heinrich von Kleist, chef-d'œu