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Interview

Ils mystérieux

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Drague. Avec le polar nudiste «l’Inconnu du lac», Alain Guiraudie allie le radicalisme et la douceur. Rencontre à Paris, après son succès cannois.
Alain Guiraudie, le 16 mai à Cannes, où le cinéaste a reçu la Queer Palm. (Photo Audoin Desforges)
publié le 11 juin 2013 à 20h06
(mis à jour le 13 juin 2013 à 10h30)

Faute d'avoir le loisir de tourner aussi souvent qu'il le voudrait, Alain Guiraudie, 49 ans et seulement quatre longs métrages, aura tardé à concrétiser tout à fait sur une durée excédant l'heure de fiction les folles promesses de ses œuvres courtes - de Les héros sont immortels (1990) à Ce vieux rêve qui bouge (2001) et Du soleil pour les gueux (2001). Si quelque chose dans les beautés libertaires et sensorialistes de Voici venu le temps (2005) ou le Roi de l'évasion (2009) semblait toujours en morceler la cohérence ou en brider l'allant, l'Inconnu du lac est ce film qui réconcilie enfin le cinéma de Guiraudie avec la plénitude de la grâce de ses débuts et l'excède amplement. A Cannes, où le film concourait à Un certain regard, il a été distingué par la Queer Palm et le prix de la mise en scène.

Vous apparaissez vous-même nu dans l’un des premiers plans du film. Vous vouliez être le premier à poil, pour montrer l’exemple ?

Oh, c’est le genre de petits rôles qui restent longtemps à pourvoir, dont on se dit qu’on ne va pas déplacer un comédien pour ça, et que quelqu’un de l’équipe finira par le jouer. En l’occurrence, c’était pas plus mal que je m’en charge, puisque ça a le mérite de désamorcer toute suspicion de voyeurisme de ma part. Et puis, je me suis aussi dit que Carax avait ouvert son film en pyjama l’an dernier, et qu’il fallait que je fasse mieux que ça…

Le film invente une sorte d’utopie insulaire, une sorte de société alternative peuplée d’hommes nus, qui ne cesse pourtant de faire référence à une réalité extérieure à laquelle on n’a pas accès. Des dîners, des apéros…

On a tourné sur une île, il y avait effectivement un côté très Seul au monde [de Robert Zemeckis, ndlr]. Mais la civilisation alentours existe délibérément beaucoup dans le film, nota