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Libération
Critique

«L'inconnu du lac»: ni vêtu ni connu

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Sous-bois. Une rêverie étincelante dans un paradis masculin traversé de violences.
Franck (Pierre Deladonchamps), un bain entre deux baises. (Photo DR )
publié le 11 juin 2013 à 20h06
(mis à jour le 12 juin 2013 à 9h49)

Sans que l'on puisse ici s'appuyer, hélas ! sur des statistiques indiscutables, avançons qu'il est rare que les cinéastes sérieux (Cannes, Arte productions…), au seuil de leur film, exhibent aux spectateurs leurs parties intimes. Alain Guiraudie, tel un petit moine dévergondé jetant son froc aux orties, a choisi de s'allonger dans le plus simple appareil dès les premiers plans de l'Inconnu du lac. L'axe de la caméra - placée à hauteur des orteils en éventail, dans une perspective latérale et plongeante - offre à notre regard les cuisses bronzées, un bout de scrotum et la verge au repos de l'artiste rôtissant au soleil.

Cette exhibition inaugurale n’est pas fortuite, de même que toutes celles qui vont jalonner un récit resserré dans un espace de drague gay lacustre et nudiste dans le Midi, entre eau, plage et fourrés. Sortant du champ des convenances, il lui faut accomplir sans tarder cette transgression impudique pour que puisse se déployer, avec une éblouissante évidence, les chorégraphies de sa microsociété d’hommes en vacances et en rut. Le monde du film naît de cet écart, de cette franchise.

Dans ce théâtre de poche, qui va peu à peu révéler sa dramaturgie tendue de huis-clos à ciel ouvert, trois personnages se détachent. Il y a Franck d’abord, qui aime fendre l’eau fraîche du lac avant de chercher l’aventure dans les buissons ardents bordant la grève. Franck repère Henri, toujours isolé, jamais nu, gros homme taciturne toisant l’horizon d’un air suspicieux. Intri