Deux hommes, que l'on pourrait croire amis, cheminent à moto au milieu de l'irréelle blancheur d'os d'une carrière rocheuse. Le passager, qui prétexte une envie pressante, exige l'arrêt. Il fait mine de s'exécuter, revient d'un pas tranquille et, sans que rien ne puisse le laisser deviner, poignarde sauvagement le conducteur, enfourche l'engin et s'enfuit. Puis, alors que le regard de la caméra fixe encore flegmatiquement le corps inerte et que l'on pourrait croire le meurtrier déjà loin, celui-ci reparaît pour achever sa victime de quelques coups de lame réitérés, avant de filer à nouveau. Dans sa lenteur tragique et sa cruauté à froid, son silence et l'indifférence blafarde de sa lumière, sa métrique bégayée qui semble redoubler la détermination du crime, la scène est frappante. Mais elle est, semble-t-il, banale aussi : «Il a tué la victime pour la voler. La routine», assènera placidement le policier qui découvrira le cadavre.
Défiance. S'il nous saisit dès ces premiers plans, on ne peut s'empêcher d'abord de nourrir une certaine suspicion vis-à-vis de People Mountain People Sea, second long métrage de Cai Shangjun, metteur en scène de théâtre et scénariste tardivement reconverti cinéaste, bardé de prix et d'éloges au gré de sa croisière à travers les places fortes festivalières - notamment à Venise, d'où il repartit il y a deux ans gratifié du lion d'argent de la mise en scène. Suspicion, car le film présente, tant p