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Critique

«La Danza de la Realidad»: Danse avec l’hallu

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Culs-de-jatte. Alejandro Jodorowsky s’évade avec ses propres souvenirs, entre Fellini et Hergé.
publié le 3 septembre 2013 à 19h06
(mis à jour le 4 septembre 2013 à 13h03)

A 84 ans, Alejandro Jodorowsky jouit d'un statut singulier, sans grand équivalent dans le panorama cinéphilique actuel, celui de cinéaste underground (lire ci-contre). Avec son septième long métrage, «Jodo» adapte son autobiographie parue en 2001 et fait sa Nathalie Sarraute, imbriquant dans sa narration des réflexions très semblables à celles qui enclenchaient l'Enfance de la romancière, elle-même alors octogénaire : «Alors, tu vas vraiment faire ça ? […] Tu veux évoquer tes souvenirs… il n'y a pas à tortiller, c'est bien ça.»

Sardines. Se confrontant au défi autobiographique, il est donc retourné dans sa ville natale, Tocopilla au Chili, et il y a tourné, dérivant sur ses souvenirs, accolant des faits (un père autoritaire, communiste tendance stal) à des détails filmiques. Entre autres, la mère (hystérique) ne parle pas, mais chante en permanence des arias de cantatrice. Jodorowsky s'amuse, il installe une bande de manchots et de culs-de-jatte antisémites dans une ruelle crade, dépose un clochard céleste sur un ponton. Des sardines descendent du ciel, un cirque itinérant se parfume d'angoisse.

Mais dans cet ensemble de saynètes mémorielles et felliniennes (Amarcord est dans le coin), il pose toujours, avec malice, la question de l'autorité. Celle du père, évidemment, mais aussi de l'engagement politique qui vire au martyre. Et il s'amuse de celle du cinéma, ce continent dont il a toujours emprunté les