L'Américain Edward Sheriff Curtis (1868-1952) est surtout connu pour The North American Indian, gigantesque entreprise ethno-photographique ayant consisté pendant plus de trente ans à documenter la vie et les coutumes de ce qui persistait alors des tribus amérindiennes (Apaches, Sioux, Cheyennes…). Des dizaines de milliers de photographies, dont certaines célèbres, comme le portrait du chef Geronimo, réunies en partie dans une encyclopédie en 20 volumes dont le dernier tome parut en 1930.
Bien que financé par le banquier Morgan et parrainé par le président Theodore Roosevelt, Curtis, qui ne concevait pas ses expéditions en territoire indien sans une importante équipe d'assistants et de conseillers plus ou moins anthropologues, était constamment en manque de financements. En 1914, c'est en partie pour se renflouer que Curtis va entreprendre le tournage d'un film In the Land of the Head Hunters, dont il espère que le succès lui apportera notoriété et subsides. Durant cinq saisons successives, il va partager la vie quotidienne des Kwakiutl, une tribu d'Indiens nord-américains installée sur l'île canadienne de Vancouver. L'expression contemporaine de docu-fiction décrit parfaitement le projet de Curtis. Il s'agit d'induire une romance «occidentale» dans un contexte «réel» et des décors «naturels». En l'espèce, l'histoire d'amour entre Motana, jeune guerrier, et Naida, fille d'une tribu rivale, promise à un puissant sorcier. Divers atermoiements, péripéties et co