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Libération
DVD

Sabordage plein de panache

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Une épopée bricolo-pop au charme fou.
«L'Epée et la Rose» (Photo Shellac)
publié le 13 décembre 2013 à 19h46

Pour rompre avec les angoisses terribles de la routine trentenaire, certains se mettent à la gym suédoise ou au crack. En vain, trop souvent. Il en est d'autres, plus rares, qui du jour au lendemain embarquent à bord d'une caravelle avec quelques bons amis et s'y font pirates, tel Manuel, héros de l'Epée et la Rose, premier long métrage du cinéaste portugais João Nicolau, qu'il faut redécouvrir après une trop discrète sortie estivale en salles voilà deux ans. Manuel, donc, s'ennuie à errer dans son appartement, à croupir au lit jusqu'à pas d'heure, et de ne converser guère qu'avec son chat, sa bonne, son Mac et l'inspecteur des impôts - mais en chansons, dans un superbe prologue qui, à défaut d'énoncer un programme, donne le ton : évaporé, musical, résolument joueur.

Au terme d’une demi-heure à dépeindre la monotonie blafarde de cette existence lisboète, le film dévoile donc seulement, en même temps que son générique inaugural, son dessein : prendre le large, à tous les égards. C’est-à-dire, pour le personnage, laisser là tout ce qui n’a pas sa place à bord d’un navire corsaire et, pour la fiction, se défaire de codes et attentes pour mieux s’offrir l’aventure, la vraie, dérouter sans cesse et dériver entre les genres : équipée anticonformiste en haute mer, burlesque minimal, science-fiction lo-fi.

D'une extrême précision formelle en dépit de moyens à l'évidence faméliques, l'Epée et la Rose avance par indices, égrainés sur le fil d'une inspiration serpentine