Il faut un certain temps au spectateur du dernier film de Hayao Miyazaki, même un connaisseur de l’œuvre du cinéaste japonais, pour comprendre que le monde dans lequel il baigne avec un certain bonheur est en train de pourrir en majesté sous ses yeux. C’est un effet très curieux dont la magie tient au fait que l’on ignorait à quel point on y était préparé.
Depuis le début du Vent se lève, un parfum inconnu et merveilleux flottait parmi les paysages (le Japon) et les décors (les années 20), dont on sentait bien que, sans qu'on puisse les identifier, s'y mélangeaient ces quelques notes étranges, très belles mais morbides, sournoises, qui bientôt domineront. Les couleurs également, quand on y songe, comprenaient dès l'origine les traces funèbres d'une déréliction, tapissées sur un océan de félicité soyeuse, qu'elles vont s'employer à progressivement avarier.
Pyjama. On peut en dire autant de la rumeur de la grande Histoire, qui commence par faire battre sa percussion lointaine, presque anecdotique, presque pittoresque, pour finalement tout recouvrir de son infernal, obscène et dévorant tambour. Et, au fond, c'est idem pour le grand amour que Le vent se lève nous raconte au premier plan, dont la teneur de fable gracieuse, de miracle courtois, charrie dès sa source le fatum qui le fera basculer vers le mélodrame, puis ronger par la tuberculose et la tragédie.
Cet assombrissement progressi