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Sixties

Widerberg, l’avis moderne

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Trois films de ce dynamiteur du cinéma suédois ressortent cette semaine en salles.
Pia Degermark dans «Elvira madigan». (Photo DR)
publié le 28 janvier 2014 à 17h36

«L'ancien cinéma véhiculait un mensonge jusque dans sa forme même… Il décrivait un monde entier, sans brisure, qui ne pouvait être interprété que d'une manière univoque. Mais où un tel monde se trouve-t-il aujourd'hui ?» En 1965, cette diatribe a beau être énoncée dans le film Amour 65 par un personnage de fiction, elle résonne alors avec de tels accents de manifeste que l'on ne peut que la soupçonner de traduire le fond de la pensée du cinéaste qui, tapi derrière la caméra, a soufflé à l'acteur ces mots désenchantés. Un trentenaire dénommé Bo Widerberg, ancien critique et écrivain, passé cinéaste depuis peu.

Le même signait trois ans plus tôt un virulent recueil d'articles, évident décalque du pamphlet de Truffaut Une certaine tendance du cinéma français, où il s'en prenait tant à la médiocrité croupissante des films produits alors en Suède qu'à la figure totémique et écrasante d'Ingmar Bergman. Du maître, Widerberg fustigeait alors le «cinéma vertical», dépourvu de conscience sociale et complaisamment étanche aux réalités du présent. Un art sentencieux, confiné dans son obsession personnelle de la relation de figures bourgeoises à Dieu, qui reconduisait les pires «mythes grossiers sur les Suédois, que les étrangers raffolent de voir confirmés». Ainsi appelait-il de ses vœux un cinéma plus «horizontal», attentif aux réalités sociales complexes, épris de liberté et de jeunesse, décorseté des conventions académiques. Soit,