Aforce de croiser les regards, parfois, ça louche. A fortiori si le film, coréalisé par deux João portugais (Pedro Rodrigues et Rui Guerra da Mata), s'intitule la Dernière Fois que j'ai vu Macao. Or, si le film est consubstantiellement atteint d'un strabisme, il est plutôt divergent que convergent. Louche en effet, mais au sens incertain du terme.
João Pedro Rodrigues n’avait jamais été à Macao, ancienne colonie portugaise rétrocédée à la Chine en 1999. João Rui Guerra da Mata y a passé une partie de sa prime enfance dans les bagages d’un père militaire. Les souvenirs de l’un deviennent les imaginations de l’autre, sans que le point de vue du vécu (j’y étais) ne l’emporte sur celui de la fiction (j’en ai rêvé).
Le prétexte du voyage de retour est une fantaisie policière : Guerra da Mata reçoit à Lisbonne un mail en forme de SOS expédié par Candy, une vieille amie exilée à Macao où, d'après ses propres mots, «il se passe des choses effrayantes». Ce n'est pas Guerra da Mata en personne qui débarque un jour de brouillard dans le port de Macao, mais sa voix, qui restera off, comme piégée dans les limbes du film, tandis que les corps des principaux protagonistes (Candy et ses tourmenteurs) sont eux aussi des fantômes dont n'est visible que la fuite (un tueur vient de partir) ou l'évaporation (une femme disparaît). N'est vraiment vivant qu'un manuel de zoologie fantasque où un tigre le dispute à des meutes de chiens errants.
Toutes ces épaisseurs de fiction - la par