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Interview

«Et si les sciences sociales irriguaient le cinéma et les séries?»

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Marie-Hélène Bacqué détermine les origines de ce rapprochement qu’on pouvait penser impossible il y a seulement dix ans.
«The Wire». (Photo DR)
publié le 14 mai 2014 à 18h06

Marie-Hélène Bacqué Professeure d’études urbaines à l’université Paris-Ouest-Nanterre 

Depuis quelques années, le Festival de Cannes a ouvert ses portes aux séries télévisées, objet souvent expérimental dans lequel le cinéma n'hésite pas à puiser abondamment. Il aurait bien tort de se priver. Olivier Assayas avait inauguré la tendance en 2010, avec Carlos, essuyant au passage les critiques des défenseurs du «vrai cinéma». L'an dernier, le formidable Top of the Lake de Jane Campion a été invité à la Quinzaine des réalisateurs, qui récidive cette année en conviant P'tit Quinquin, la série de Bruno Dumont, en séance spéciale. Pour déterminer les origines de ce rapprochement qu'on pouvait penser impossible il y a seulement dix ans, mieux vaut remonter au début des années 2000, quand les séries américaines ont connu un nouvel âge d'or.

Diffusée sur la chaîne américaine HBO de 2002 à 2008, la série The Wire (Sur écoute) est, comme la consacre le sociologue américain William Julius Wilson, «la meilleure ethnographie jamais réalisée de l'Amérique contemporaine».

Plongée de cinq saisons en apnée dans le Baltimore du crack, de la misère, de l'effondrement économique et des quartiers vidés de leurs habitants, The Wire est aussi, ainsi que le soulignait son créateur, «une réflexion sur ce que les institutions font aux individus, que ce soit la bureaucratie, les organisations criminelles, la c