C'est un peu tricher que d'inaugurer cette série d'articles sur les personnages féminins dans les films cannois par une chronique d'un film 1) écrit et réalisé par Céline Sciamma, 2) ayant pour titre Bande de filles.
D'abord parce qu'avec ses deux précédents films déjà, Naissance des pieuvres et Tomboy, la jeune réalisatrice française avait imposé son regard fin dans l'affirmation d'identités féminines fortes, complexes, troublées et troublantes. Ensuite, parce que ce bien nommé Bande de filles suit effectivement les pérégrinations banlieusardes d'un quatuor d'adolescentes défiant par chacun de leur geste la loi des garçons qui règne dans leur quartier. Quitte à plagier parfois des attitudes supposées viriles (elles se provoquent en duel, se roulent dans la poussière et se font traiter de «meuf» quand elles échouent), mais toujours en affirmant très fort une féminité qu'elles expriment à travers leur garde-robe et leurs longs cheveux que leurs aînés masculins menacent de couper à la moindre incartade.
Autant dire que Bande de filles passe haut la main le test de Bechdel (1). Car Marieme, Lady, Adiatou et Fily (Karidja Touré, Assa Sylla, Lindsay Karamoh et Marietou Touré) ne parlent pas, elles mitraillent. Plus encore que leur apparence, leurs mots sont des armes tranchantes qui mettent K.-O., en deux vannes, trois coups de boule, les adversaires les plus coriaces. Omniprésents dans les rues de leur cité, les garçons sont fi