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Crise

«La Belle Jeunesse» et «Gente de Bién»: inégalités à l’accent espagnol

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Deux films réalistes sur les rapports de classes à Madrid et à Bogotá.
Eric, jeune Colombien, à chlore et à cri, dans «Gente de Bién». (Photo DR)
publié le 19 mai 2014 à 19h26

Les échos de la crise qui sévit en Espagne se sont dissous peu à peu dans d'autres tumultes du monde. Ce n'est pas pour autant, ainsi que Jaime Rosales vient le rappeler, que l'entreprise de démolition d'une classe moyenne qui bascule inexorablement dans la pauvreté n'est plus à l'ordre du jour. Et que les jeunes Madrilènes, puisque c'est d'eux qu'il est question ici, ont fini d'en baver des ronds de chapeau. Le couple d'amoureux de la Belle Jeunesse a la vingtaine accablée. Ils flirtent à l'arrache, font la fête dans la rue parce que les clubs, c'est trop cher, ont arrêté leurs études parce qu'à quoi bon, et cherchent du boulot à plein temps. Ouvrier sous-payé sur des chantiers pour Carlos, baby-sitting pour Natalia, les jours de chance.

Ils sont beaux comme des cœurs, mais n'ont pas le loisir de s'en rendre compte. Pas le temps, pas la tête à ça. En dehors, pour le garçon, d'une passion pour l'Atlético (joli sacrifice de Rosales, aficionado notoire du Barça), le couple muselle tous ses espoirs, ses envies et ses rêves. Avec mille précautions pour ne jamais déraper dans un pathos superflu, Rosales met en scène l'élasticité d'une histoire d'amour qui survit, inexplicablement, sous le tapis de bombes des séquelles d'une société malade. Quand un enfant arrive dans le paysage, ce n'est qu'une contrainte comptable supplémentaire. Et quand Natalia part chercher du travail à Hambourg, parce que «pas besoin de bien parler Allemand pour nettoyer les chiottes», c'est