Olivier Assayas a pris de la hauteur. Dans un refuge de montagne qui n'est pas seulement juché dans les Alpes suisses mais qui est aussi le berceau, voire le vivier du romantisme allemand. Sils-Maria en Engadine, un haut lieu au sens géographique et artistique, décrit comme suit par Nietzsche en août 1881 : «A Sils-Maria, à 6 500 pieds au-dessus de la mer et beaucoup plus au-dessus de toutes choses humaines !» Une région parfois traversée à l'automne par un étrange phénomène météorologique, lorsqu'un air humide monte des lacs italiens tout proches et se transforme en un fleuve de nuages franchissant le col de la Maloja et déversant son inondation moutonnante dans les vallées.
Ce nuage, nommé «serpent de Maloja» et somptueusement cadré par Assayas, est aussi le cloud du film, une nébuleuse mentale d'où surgissent bien des ombres : littéraires (de Stifter à Walser), picturales (Caspar David Friedrich évidemment), musicales (Haendel, Pachelbel…) et cinématographiques : une archive en noir et blanc du serpent de Maloja filmé en 1924 par le «célèbre» documentariste Arnold Fanck, mais aussi, l'intrigue se nouant, le Persona de Bergman, All About Eve de Mankiewicz, l'Identification d'une femme d'Antonioni et, pour le liant, souvent comique, Femmes de Cukor. Sils-Maria est en effet un film de femmes entre elles.
Equidistance. Au tout premier plan, Maria Anders, star du cinéma et du thé