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Libération
chronique

Pitié : critique cinéma !

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«Winter sleep», palme d'or en 2014. (Photo Nuri Bilge Ceylan)
publié le 10 juin 2014 à 18h06

«Tout ce que je peux dire, c'est que ce n'est pas turc, que ça ne dure pas 3 h 20 et que ce n'est pas chiant.» Qui a dit ça ? Forcément un immense cinéphile doublé d'un important cerveau, quelqu'un qui fait carrière en tout cas, quelque part entre presse vaguement écrite et télé vaguement visuelle. Mais pourquoi nous ne disons pas son nom ? Parce que la balance n'est pas trop notre came, et surtout parce que ça nous ferait saigner les gencives de lui faire, même en négatif, de la pub. D'autant que l'auteur de cet aphorisme n'a hélas pas le monopole de ce style de bande-annonce pour «Mon Beauf fait du cinéma». C'est même devenu un genre, presqu'une consigne pour certains qui estiment que, selon une fameuse loi du Net, la malveillance fait plus de clic que la bienveillance. A ce titre, même si, en tout cynisme, on n'en pense pas moins, plus c'est gros, gras, vulgaire, con, plus c'est mieux pour le beuze. Version soft : «C'est pas un peu intello comme film ?» Version hard : «C'est très intello comme film et, en plus, ça manque de paillettes.» Bref rappel historique. Sans convoquer les mânes de Pierre Tchernia, la déglingue populiste du cinéma «difficile» est consubstantielle à l'exercice critique cathodique. Cf. l'expérience vite interrompue d'un Masque et la Plume version télé. Depuis, on en a vu de toutes les couleurs, mais toujours de la même odeur. Au choix : «C'est vraiment un film pour cinéphiles», ce qui, proféré dans le cadre du Festival de Ca