La sensation courte de ce début d'année a deux visages jeunes et jolis. Encore guère identifié il y a seulement quelques mois par la confrérie cinéphile, le couple Caroline Poggi et Jonathan Vinel a conquis à la Berlinale en février l'ours d'or du court métrage, avec un film (présenté au sein de l'excellent festival Côté Court de Pantin, en Seine-Saint-Denis) qui leur vaut désormais d'être entourés d'attentes, d'excitations et, sans doute déjà, de quelques appétits de producteurs. Un film, à la fureur comme glacée sur place et à la désespérance saturée de promesses, qui s'appelle Tant qu'il nous reste des fusils à pompe. Pas des fusils de chasse, pas des mitraillettes, non, des fusils à pompe, soit l'arme d'une absolue décharge, éjaculatoire, toute adolescente.
Et ça commence justement par l’oraison funèbre d’un grand enfant, cramé avant la maturité par le feu de son propre canon tourné contre lui. Un tombeau incantatoire, érigé par le meilleur ami du défunt, pour la dernière nuit d’une espèce de Ian Curtis 2014 en Nike Cortez qui, plutôt qu’Iggy Pop ou Werner Herzog, contemplerait un match de NBA avant de se flinguer d’ennui. Au milieu de l’été ainsi endeuillé d’une insituable ville fantôme, où l’on s’abîme tout habillé dans les piscines mauves pour échapper à l’accablement du soleil, se déploie alors pour les survivants une quête, où il ne s’agit que de mourir à sa suite ou d’arracher l’appartenance à une famille, fût-elle terrifiante.
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