Pippo Delbono déambule dans les rues de L'Aquila, la cité des Abruzzes partiellement anéantie par le tremblement de terre d'avril 2009. Les places sont désertes, les immeubles aveugles et ruinés. Une ville à l'image de l'homme qui la filme : abandonnée. Comme dans tous ses films précédents, Pippo Delbono mêle l'actualité de tous à la sienne propre, familiale et privée, qui a priori n'intéresse et n'angoisse que lui. C'est pourtant par cet œilleton de l'intimité que Sangue ouvre sa focale jusqu'à l'élargir à un monde commun.
Miracle. Margherita, la mère de Delbono, se meurt d'un méchant cancer. Le cinéaste va «documenter» sa longue et douloureuse agonie, de la chaise de la cuisine au lit de la chambre, de l'hôpital au funérarium. Il dit, au cas où le reproche moral d'un voyeurisme excessif surgirait : «La caméra est un œil objectif qui empêche que la douleur me transperce.» Il filme ainsi, comme s'il ne s'agissait pas de lui, la dévotion d'un fils qui, dans l'espoir du médicament miracle, «du venin de scorpion bleu» - et pourquoi pas du jus de dragon ? -, va se traîner jusqu'à Tirana où des pharmacies semi-clandestines commercialisent le remède. C'est un épisode tragicomique où on se perd dans les rues de la capitale albanaise, excédé comme Delbono que le chauffeur de taxi se paume dans le dédale des embouteillages.
A l'instar du documentaire l'Allemagne en automne (1997), où Rainer Werner Fassbinder (un