Sarah Leonor, née en 1970 à Strasbourg, signe avec le Grand Homme son troisième long métrage après le Lac et la Rivière et Au voleur.
Vous dites vous être inspirée du mythe de Gilgamesh…
Je ne voulais pas faire une adaptation du texte mais le transposer dans un monde contemporain en respectant ses principes de base. «Le Royaume», c’est la France d’aujourd’hui, les guerriers, ce sont des soldats, l’amitié entre le roi Gilgamesh et son jumeau antagoniste, Enkidu, point central de l’épopée, est celle qui unit les deux personnages adultes… J’ai simplement inventé le personnage de l’enfant qui contient en lui l’idée même de la finitude et de la transmission.
Les thèmes d’actualité (les sans-papiers, les institutions dépassées par la situation…) sont toujours en marge du récit.
Je ne voulais certainement pas faire un film à thèse parce que, personnellement, je n’ai pas de thèse sur les gens qui vivent sans papiers en France, sur les usages dans la police ou la Légion étrangère.
Je me suis aidée de l’architecture du mythe pour construire des personnages dont je me sens proche, et dont je ne voulais pas qu’ils soient des fonctions. Par exemple, je répétais à Surho Sugaipov que son personnage de Markov n’était pas une victime, qu’il était bien plus que cela, surtout dans sa recherche identitaire.
Vous semblez aussi éprouver une certaine empathie pour les personnages qui ne sont que les rouages d’une bureaucratie ?
Il m’a semblé intéressant de construire des personnages pris dans l’engrenage des lois. J’ai porté beaucoup d’attention à celui du policier qui envoie l’enfant dans un foyer. On voit bien qu’il n’a pas très envie de faire