Rencontre avec Bertrand Bonello, 46 ans, auteur avec Saint Laurent de son septième long métrage. Il a déjà écrit le suivant, intitulé Paris est une fête, une histoire de terrorisme au cœur de la capitale française. Après, il voudrait faire «autre chose, ou autrement».
Vous avez dit que pour faire ce film, vous aviez dû décréter : «Saint Laurent, c’est moi.» Qu’est-ce que cela signifie, concrètement ?
J'avais très peur du genre biopic. Ma première crainte, c'était de n'être qu'un observateur face à une série d'événements et de dates. Que Saint Laurent ait existé, c'est une réalité pesante. Il faut donc le faire tomber de son image, afin de pouvoir m'approcher et fabriquer via la fiction ma propre empathie pour le personnage, jusqu'à approcher le «Madame Bovary, c'est moi» de Flaubert. Ensuite, il faut dire que c'est un personnage avec qui, sans parler du talent et du succès, je me suis senti beaucoup de points communs. Et, en écrivant, je me suis presque forcé à me dire que je devais me retrouver dans chaque scène, que je devais y croire profondément, la faire mienne, afin d'abolir la distance inhérente au biopic, cette distance qui peut faire que l'on se contente d'assister à la mise en image d'une fiche Wikipédia.
C’est la première fois que l’un de vos films résulte d’une commande. C’est aussi le plus cher que vous ayez réalisé (8 millions d’euros). Cela changeait quelque chose ?
C'était une commande, mais surtout une proposition. Tout était à faire. Il n'y avait qu'un nom, Saint Laurent. La seule question, c'était comment faire cette idée mienne, me la rendre assez personnelle et, assez vite, j'ai trouvé les points sur lesquels je pouvais me l'approprier. J'ai pu avoir peur que d'avoir plus d'argent me fasse travailler différemment, m