C’était il y a bien des années, lors d’une des toutes premières éditions du festival Premiers Plans à Angers. On y rendait hommage à une dame dont on ne reconnaissait pas tout de suite la silhouette arrondie, mais dont le regard était immédiatement identifiable. Des grands yeux clairs, des yeux très bleus, des yeux à se noyer d’amour ou de chagrin. Les yeux de Marie Dubois, morte hier à Pau des suites d’une sclérose en plaques qui la rongeait depuis des décennies. Elle était née Claudine Huzé, à Paris le 22 septembre 1937. Claudine, comme l’héroïne récurrente de Colette, fausse oie blanche et vraie délurée. Claudine va à l’école, passe son bac. Claudine apprend la comédie au Conservatoire de Paris. Claudine se jette sur les planches du théâtre dans des rôles fatalement typés de blonde ingénue. Claudine enfin fait du cinéma, emportée par la Nouvelle Vague qui va changer sa vie, son nom et ses rôles.
C'est Eric Rohmer qui la repère le premier, en 1959, pour un petit bout de personnage dans le Signe du lion. Godard l'inclut à son tour dans son gynécée de filles bizarres et libres : elle est la blonde face à la brune (Anna Karina) dans Une femme est une femme, en 1960. Mais son vrai mentor et Pygmalion s'appelle François Truffaut. Il débaptise Claudine Huzé et la rebaptise Marie Dubois, d'après le roman éponyme de Jacques Audiberti. Dans Tirez sur le pianiste en 1959, Marie Dubois est une des trois filles qui gravitent autour du sombre Charlie (Aznavour