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«Historia del Miedo», le sale air de la peur

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Portrait kaléidoscopique d’une métropole argentine.
Scène phare du film, le peuple aura ta peau. (Photo Shellac)
publié le 4 novembre 2014 à 17h06

Si le titre la Somme de toutes les peurs n'avait pas été préempté, il aurait convenu au premier long métrage de l'Argentin Benjamin Naishtat. Histoire de la peur, généralisant et un rien présomptueux, convient aussi, avec ses réminiscences de Borges (Histoire universelle de l'infamie, Histoire de l'éternité). Si la peur est au centre du film, le spectateur ne la ressent pas en sursautant, comme dans un film d'horreur, mais d'une façon plus insidieuse et subtile.

Les craintes qui tissent le quotidien des habitants d’une grande ville composent une mosaïque : le malaise provoqué par une alarme déclenchée par accident (ou pas), la peur d’un enfant de se faire gronder ou celle du père d’entendre ce même enfant se rebeller. Les personnages sont isolés dans leur environnement, marqueur de leur statut social. Dans leur propriété, les nantis se sentent menacés par la fumée et la puanteur venant de l’autre côté du grillage qui protège leur confortable existence : les ordures que brûlent les occupants illégaux du terrain contigu.

Peur de déranger, de mal faire, de décevoir, d’être soi-même : c’est presque une nomenclature (obsession borgésienne) que le film décline, un système qui finirait par lasser si l’ironie et l’humour absurde ne s’y mêlaient. Progressivement, la quinzaine de personnages s’interconnectent : ils ont des liens familiaux (parents et enfants) ou professionnels (maîtres et valets). Ce recours à un dispositif de narration lelouchien affaiblit un