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Interview

«Les années 90, c’est jouir pour survivre»

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Photo du tornage d'«Eden», exposée à la galerie 12Mail (12 rue du Mail, 75002), jusqu'à vendredi. (Photo Estelle Hanania)
publié le 18 novembre 2014 à 17h06

Professeur d'études américaines à l'université Paris-X-Nanterre, l'historien François Cusset a récemment coordonné Une histoire (critique) des années 90 (éditions La Découverte), catalogue de «1984-1999 : la Décennie», exposition en cours au centre Pompidou-Metz. Ici, à travers quelques mots-clés, il esquisse l'esprit de l'époque qui a vu naître le mouvement electro, et qui sert de décor à Eden.

Engagement

«Dans l’electro des années 90, on sent surtout, à première vue, l’effet dépolitisant d’une culture ironique, expansive, hyperréférentielle. Après les politiques du refus (punk ou new wave), ce serait un peu le refus de la politique. Mais, à y regarder de plus près, certaines dimensions de l’electro, sa combinatoire critique (contre le mythe du génie créateur, encore fort en musique), son érudition libre, son rapport à la machine et, bien sûr, ses prolongements festifs marginaux et anticonformistes, du moins dans un premier temps, lui confèrent une prise politique sur l’époque, comme une politique minimale de la ruse, du contournement, de l’autonomie par les usages.

Jouissance

«Dans les années 90, on n’est plus dans les années 60 : l’hédonisme n’est plus une contre-norme, une démonstration politique, un prosélytisme émancipateur, c’est surtout la constitution d’abris ou de zones dérogatoires, au sein desquels expérimenter des formes de transe. En gros, ça n’est pas jouir pour changer l