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Echec et mythes

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«Mercuriales», film vaudou dans les décombres de l’ultracontemporain.
Les tours jumelles Mercuriales, à Bagnolet, en Seine-Saint-Denis. (Photo Kazak Productions)
publié le 25 novembre 2014 à 17h06

L'ahurissant Mercuriales, de Virgil Vernier, sécrète une impression semblable à ces disques, tout de modulations et de bourdonnements de synthétiseurs analogiques, enregistrés sur microsillon dans les années 70 et 80 par Brian Eno, Suzanne Ciani et quelques autres. Même beauté aux vapeurs neuroleptiques, même sentiment d'obscuration des sens et de leurs usages, dans un processus dont on croirait sans mal, au fond, qu'importe peu la vitesse à laquelle s'en joue la partition minimale - 33, 45 ou 78 tours ; 12, 24 ou 48 images par seconde -, le train ainsi impulsé à sa procession de visions foudroyées. Que l'opacité de leur mystère se diffracte ou s'emballe, seule diffère l'allure à laquelle l'ivresse se propage en nos synapses, pour en chambouler les connexions ramifiées.

Car oui, par le trouble où il nous abîme et le désordre hallucinatoire auquel il travaille jusque dans le moiré de sa plastique, Mercuriales fait des choses à notre cerveau. Comme ces chefs-d'œuvre seventies, imprégnés de magie, du Jacques Rivette circa Céline et Julie vont en bateau, dont il peut paraître une relecture sous le climat de cendres et la lumière noir fluo d'une apocalypse qui vient. Comme les travaux de ces photographes et plasticiens avec lesquels il paraît dialoguer plus encore qu'avec des cinéastes (on songe, ici, à Lewis Baltz ; là, à Ed Ruscha ou Lawrence Weiner). Comme une certaine musique électronique, par exemple celle qui le nappe, composée par la sommité n