«Le monde est assez grand pour tout le monde. Vous n'avez pas le droit de tout posséder», un homme crie dans la nuit syrienne, il interpelle les soldats qui, embusqués quelque part au fond de la rue, massacrent hommes, femmes, enfants, un peuple sans armes. La guerre civile syrienne fait rage depuis quatre ans et Eau argentée ressemble à une sorte de Guernica 2014. Ce que Picasso réalise en 1937 pour dénoncer le bombardement de la ville basque espagnole, Ossama Mohammed et Wiam Simav Bedirxan l'accomplissent dans une même geste de radicalité rageuse avec Eau argentée. Du magma d'images extirpées des entrailles de YouTube documentant la chronologie désastreuse des événements qui vont conduire le pays au fond du gouffre, les cinéastes composent une œuvre de décombres à la fois terrifiante et grandiose. Ici, le monde est comme broyé par les mâchoires d'une histoire devenue folle et recraché en jets de pixels qui assemblent et défont la cohérence des gestes et des actes d'hommes, de paysages, de villes, d'animaux, de ciels.
Cordon. Le début est une naissance, un nouveau-né auquel on coupe le cordon ombilical et que l'on baigne. Immédiatement après, dans un silence de mort, surgit un jeune homme torse nu et en slip, les mains pendantes, le dos voûté. Des hommes lui font baiser leurs bottes, le cognent et simulent une sodomie avec une matraque. A Derea, un garçon a écrit sur un mur en sortant de l'école :