Tous les jours, l’écrivain livre sa vision du Festival de Cannes, où qu’il soit.
Monsieur Parvulès-Kahn s'apprête à quitter Utrecht. Le festival littéraire se termine. «Vous rentrez sur Paris ?» lui demande un homme qui manie mal les prépositions. «Je vais peut-être aller à Cannes», répond-il laconiquement. «Ah, pour les stars !» continue l'imbécile. Monsieur Parvulès-Kahn trouve la force de répondre «non, pour les films», avant de s'éloigner, pas mécontent d'avoir fait une réponse plate comme l'eau du canal. Les stars, il vient d'en voir une en la personne de Michel Houellebecq, l'invité-vedette de City2cities. Ici, le Palais des festivals, c'est l'ancienne poste en briques. Dans la salle pleine, 300 personnes regardaient l'écrivain allumer une clope, siroter un whisky, dire des banalités. Ils étaient là pour le personnage. Michel Houellebecq avait saisi la fascination du temps pour les marques. Il en était une lui-même. Les marques avaient remplacé les stars. Arborer une mine sinistre est sans doute la seule chose qu'une star de cinéma ne puisse pas faire en public. Déplaire, dit-il.
Monsieur Parvulès-Kahn regagna la gare. Il avait beau chercher, aucune star de cinéma ne parvenait aujourd'hui à l'exciter. Pire, même, il était incapable d'en citer une. Certes, quelques visages lui sautaient à la tête, mais il n'arrivait pas à mettre un nom sur eux. Les stars étaient devenues trop familières, il aurait pu les confondre avec ses nièces ou le staff du festival, composé de belles grandes tiges blondes. D'ailleurs, Scarlett Johansson est petite. Les stars s'éteignaient. Cette perte d'auréole l'avait attristé autrefois, maintenant il en avait pris son parti. Il était probablement le seul à se souvenir qu'Utrecht avait donné naissance à Sylvia Kristel, l'héroïne d'Emmanuelle. Eh bien, Sylvia Kristel avait eu une carrière pourrie. Elle avait sombré dans la drogue, l'alcoolisme, la trahison et l'hétérosexualité. A la fin, bouffie, elle était morte oubliée. Elle avait monté les marches, à Cannes, en 1990. Monsieur Parvulès-Kahn essuya ses grandes lunettes.