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Libération
Critique

«Ertan ou la destinée», violences viennoises

Le réalisateur autrichien Umut Dag filme un ex-taulard rongé par la culpabilité qui retombe dans une délinquance virile traitée sans originalité.
publié le 20 octobre 2015 à 18h26

Dans la première séquence d'Ertan ou la destinée, un jeune type barbu et baraqué se fait copieusement gifler dans la rue, de nuit, par une petite femme d'âge mur. L'homme se laisse faire et se prend plusieurs raclées avant de fondre en larme. On comprendra plus tard qu'il sort de dix ans de taule et qu'il a approché cette dame pour lui demander de le pardonner d'avoir tué son fils dans un accès de rage. Ertan (Murathan Muslu, un genre de Matthias Schoenaerts turco-autrichien) porte le fardeau d'une intolérable culpabilité. Il se rapproche d'un ado, Mikail (Alechan Tagaev), petit dealer qui claque beaucoup d'argent afin de se payer une démo d'enregistrement pour un disque de rap. Le gamin est emporté dans une spirale d'endettement auprès du caïd Yilmaz (Mehmet Ali Salman), et on voit venir de très loin les gros ennuis.

On comprend ici que Vienne n'est pas que la capitale de la Sachertorte et le fief de Michael Haneke. Le cinéaste Umut Dag (auteur d'Une seconde femme en 2012) montre un milieu délinquant partagé entre diverses communautés (les Turcs, les Géorgiens…) où les codes de virilité, les postures de toute-puissance et les règlements de compte sont monnaie courante. Le film relève à ce titre d'un genre déjà bien établi et essoré sans vraiment lui apporter une inflexion originale. La pulsion autodestructrice de Mikail, pourtant mis en garde par ses camarades ou Ertan lui-même, est en soi un sujet que le film peut montrer dans son crescendo de violence, mais ne peut véritablement sonder au-delà d'un nouveau constat post-tragique (fatalité sociale ? familiale ?) navré.