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Libération

Holly Woodlawn forever underground

publié le 7 décembre 2015 à 19h16

Holly Woodlawn est morte dimanche d'un cancer à Los Angeles, dans les bras de l'acteur Joe Dallessandro, avec qui elle avait été à l'affiche du film underground Trash en 1970. A 69 ans, elle était relativement inconnue, mais elle était mentionnée dans l'un des plus grands tubes rock, Walk on the Wild Side, Lou Reed chantant les premiers vers à son sujet : «Holly came from Miami, F.L.A /Hitchhiked her way across the U.S.A. / Plucked her eyebrows on the way / Shaved her legs and then he was a she».

Cette méconnaissance ne l'avait pas non plus empêchée d'être une superstar. Au sens warholien du terme. Elle était née garçon, du nom de Haroldo Danhakl, en 1946 à Porto Rico, et avait grandi à Miami. Adolescente, elle fait son coming-out transgenre, prend le nom de Holly Woodlawn, empruntant le prénom à Holly Golighty, l'héroïne de Diamants sur canapé, jouant avec la sonorité «hollywoodienne» de son nouveau nom, faisant également croire qu'elle était l'héritière du Woodlawn Cemetery, équivalent new-yorkais du Père-Lachaise en termes de notoriété.

A 15 ans, elle quitte la Floride et atterrit à New York où, dans les immeubles crasseux et les bars pré-Stonewall, elle rencontre une famille artistique, avant-gardiste, cradingue, poseuse, droguée et libre sexuellement. Et en particulier Candy Darling et Jackie Curtis, deux autres apparitions de la Factory warholienne, avec qui elle partageait, en plus du goût du speed et du mascara, l'identité transgenre. C'est avec elles qu'elle apparaîtra dans Women in Revolt, hilarante satire des mouvements féministes. Caméra hésitante et budget ridicule n'enlevaient rien au piquant de Woodlawn, comme dans Trash où, lors d'une engueulade avec le bellâtre Dallesandro, elle faisait tomber un coussin dissimulé sur son ventre pour feindre une grossesse.

Ce talent comique fut remarqué par George Cukor qui lança (sans succès) une pétition pour qu'elle soit nommée aux oscars. Suivirent d'autres films, moins fameux, un déménagement en Californie, encore de la drogue, des démêlés judiciaires, un retour en Floride, des boulots de serveuse, une autobiographie (A Low Life in High Heels, «une vie pourrie en talons hauts»). Et l'image, furieuse et touchante, d'une figure incroyablement glamour.