La rumeur le donnait gagnant depuis quelques jours, c'est donc bien Frédéric Bonnaud, actuel directeur des Inrockuptibles, qui remplace Serge Toubiana à la tête de la Cinémathèque française. Il coiffe notamment au poteau Marc Nicolas, l'actuel directeur de la Femis, l'un des finalistes parmi la quinzaine de candidats à ce poste.
Il semblerait que le soutien de Costa-Gavras, président et administrateur de la Cinémathèque depuis 2007, lui ait permis de décrocher, selon le communiqué officiel, «un avis unanime» du conseil d'administration réuni vendredi matin. Reste encore la validation écrite par Fleur Pellerin, mais le ministère de la Culture a déjà donné son accord oral.
Joint par Libération, le futur directeur affirme avoir à cœur de fortifier la vocation de la Cinémathèque à rester selon le désir de son fondateur, Henri Langlois, «un musée du cinéma» avec une recrudescence d'actions culturelles en direction du jeune public et des adolescents : «Si l'on veut que les nouvelles générations continuent de voir des films de Keaton sur grand écran, nous seuls pouvons le faire et pas seulement en les faisant venir dans les salles de la Cinémathèque mais aussi en allant vers eux.» Il dit réfléchir aussi à une offre numérique comme le fait notamment l'Opéra de Paris.
Né en juin 1967 à Avignon, Frédéric Bonnaud est le fils de l'historien Robert Bonnaud (mort en 2013), figure de l'anticolonialisme. Comme Serge Toubiana, longtemps critique aux Cahiers du cinéma, Bonnaud, qui a commencé sa carrière en écrivant aux Inrockuptibles (mais aussi à Libé), est un homme de média. Après un passage en tant qu'assistant à la programmation cinéma du Jeu de Paume, il entre à France Inter pour quelques chroniques avant de se voir confier par Jean-Luc Hees en 2003 la tranche 18 h-19 h pour une émission culturelle intitulée Charivari, où il impose un style chaleureux et gouailleur. L'émission s'arrête en 2006, remplacée par la Bande à Bonnaud pendant un an, avant que la direction décide de tout arrêter. Dénonçant une manœuvre sarkozyste, il rebondit à Europe 1 dans l'émission de Morandini. Son goût du clash et une absence d'inhibition le pousse devant les caméras : sur France 2 on peut le voir ainsi expliquer à Eric Zemmour qu'il se plante et que le communautarisme «est avant tout le fait des Blancs et des riches».