Isabelle Huppert
Sa partenaire dans «les Valseuses» (1974), «Loulou» (1980) et «Valley of Love» (2015)
«C’est une musique, Gérard. Un bloc de poésie. Il a des fulgurances qu’on croit inarticulées et qui prennent tout leur relief, leur vérité, si l’on sait les entendre. Comme un poème où des groupes de mots délivrent leur sens selon le contexte.
«Ce n'est pas sur les Valseuses de Bertrand Blier qu'on s'est vraiment rencontrés, il y avait plus de monde entre nous, même si cette scène de fugue et de défloration est restée comme l'une qui incarne l'esprit du film. Je ne vois pas de différence entre le Depardieu des Valseuses et celui d'aujourd'hui. Il est exactement le même acteur. Tellement présent… Ce qu'on tourne n'est jamais conjugué ni au passé ni au futur.
«Pour Loulou, Maurice Pialat avait mis en place un dispositif sans "moteur" ni "coupez", sans début ni fin de prise, où, pendant qu'on était en train de parler, on voyait simplement la lumière rouge de la caméra s'allumer. On passait de manière tranquille et insensible du réel à la fiction, de propos d'ordres privés et anecdotiques aux situations du film dont on inventait les dialogues. On prenait les scènes en route, comme la vie telle qu'elle vient. Et ça a continué ainsi pendant Valley of Love(photo), de Guillaume Nicloux. C'est tellement simple. Il suffit de n'offrir aucune résistance, de se montrer complètement poreux au présent, de faire confiance, et il n'y a plus de coupure.
«On joue bien ensemble. Il est mon frère de jeu. Bien sûr, il y a l’exubérance, ses blagues, le bruit qu’il déplace avec lui - chacun, sur un tournage, fait comme il peut et veut. Mais ils ne parasitent jamais, tapie en lui, cette petite voix qui se faufile et qui sonne si limpide et si proche. Et souvent si douce.»